vendredi 30 juillet 2010

Polska

14 heures. Mon téléphone pro sonne. "T'es prêt Olivier ?" Toujours prêt, moi ! J'enfile la chemise blanche sur laquelle les galons et les ailes sont déjà en place, un pantalon bleu, les chaussures noires, j'attrape mon sac de vol, et en route pour le Bourget.

Aujourd'hui, nous partons pour un fret. La préparation est donc un peu plus longue que d'habitude, puisqu'il faut changer la configuration de l'avion, en enlevant une partie des sièges et banquettes. A 16h, on quitte le parking, et une heure pour tard tout rond, je gare le Beech sous la tour de l'aéroport de Poitiers.

Chargement du fret, et on refait le plein. On n'a pas consommé grand chose, mais comme on part un peu loin, autant avoir les bidons full. En avion, plus on a d'essence, mieux c'est. Et avant de repartir, on pisse un coup. Dans un avion qui n'est pas équipé de toilettes et avant un long vol, plus la vessie est vide, mieux c'est aussi. Et on redécolle. Pour cette deuxième branche, je suis PM, et je fais donc la radio.

Notre route nous fait d'abord remonter vers Paris. On passe quasiment à la verticale de TSU, et je fais donc un petit coucou sur la fréquence de Toussus. Cap sur RANUX, puis sur LIMGO. On traverse le Luxembourg, puis on passe en Allemagne.

Nous sommes au niveau 280. Le contrôleur allemand me demande : "Confirm negative RVSM ?" Et je collationne : "Negative RVSM". Notre avion n'est pas équipé pour voler en espace RVSM (Reduced Vertical Separation Minima), et nous ne pouvons donc pas voler au dessus du 280.

Il est bientôt 20 heures, on vole depuis presque trois heures. Il est temps de manger !


La météo prévoyait de la turbulence sur notre route. En effet, ça secoue un peu, et il faut faire gaffe de ne pas se renverser le verre d'eau sur les genoux. Droit devant nous, un cumulonimbus en formation, et au niveau 280, où nous sommes, on ne va pas pouvoir passer au-dessus. Je rappelle donc le contrôle : "Request 15° right turn to avoid". Le contrôleur nous donne liberté de manoeuvre...

Puis on traverse une quatrième frontière pour arriver en République Tchèque, que l'on traverse dans toute sa longueur. Dernier passage de frontière avant l'arrivée, et nous voilà en Pologne. La destination est proche !


Quelques minutes seulement de vol en territoire polonais, et mon captain pose le King Air sur la piste illuminée de Katowice. On arrive au parking, 3 heures et 55 minutes après avoir quitté celui de Poitiers. On décharge le fret, et le camion de fuel arrive pour faire le plein.


45 minutes plus tard, on est déjà repartis. Pour le retour, je suis à nouveau PF. Décollage de Katowice, je poursuis dans l'axe jusqu'à 1600 pieds, puis virage à gauche vers notre premier point. Quelques caps radar sont donnés par le contrôleur, qui nous dit notamment : "Stop the turn at heading 230". Le problème, c'est que je suis en virage à gauche, et qu'au moment où il le dit, on est déjà au 210° ! Je repars donc en virage à droit pour reprendre le 230.

Je garde l'avion à la main jusqu'au niveau 200 (6000 mètres) puis je demande à mon captain de bien vouloir me metre l'auto-pilot. Premier passage de frontière, nous voilà en République Tchèque. La route du retour nous fait passer plus au sud qu'à l'aller. Nous avons une directe vers SBG, le VOR de Salzbourg, en Autriche. Puis on passe en Allemagne. On passe juste à côté de KPT, le VOR de Kempten. C'est amusant, parce que l'immatriculation de notre avion est EC-KPT...


Et le code OACI de Katowice est... EPKT !

Je vois arriver sur le GPS le lac de Constance, et l'aéroport de Friedrichshafen. Nouveau franchissement de frontière, nous voilà en Suisse. Le vol se poursuit paisiblement. La fréquence est calme, la lumière dans le cockpit est tamisée.


Sur notre gauche, un beau cumulonimbus qui se détache bien. Tout à coup, le nuage semble comme éclairé de l'intérieur. Un éclair. C'est très beau... On en verra plusieurs ainsi... Le contrôleur suisse nous donne une directe vers... OMAKO, un des points d'entrée de la région parisienne ! Plutôt efficace... A nouveau l'Allemagne, et enfin la France. 2 heures du matin, nous voici posés au Bourget.

Au total, 8h30 de vol, plus de 2 000 NM (3700 kilomètres) parcourus à travers les espaces aériens de pas moins de 7 pays différents (France, Luxembourg, Allemagne, République Tchèque, Pologne, Autriche et Suisse). Et 11 passages de frontière.

Une belle rotation, au cours de laquelle j'ai passé ma centième heure de vol après le CEL (Contrôle En Ligne) validant mon AEL (Adaptation en Ligne). Je ne suis donc plus (sur le papier) un pilote inexpérimenté. Mais j'ai bien sûr encore des tonnes de choses à apprendre...

samedi 24 juillet 2010

Le plus beau bureau du monde

21h30, j'arrive chez moi. J'ouvre mon carnet de vol électronique. Deux vols aujourd'hui. Ha non, en fait, trois. Même, pour mon horloge interne, c'était hier, puisque j'ai fait une nuit complète depuis, mon vol de retour de Lorient a bien eu lieu aujourd'hui.

16h30, hier, un des autres copis me propose un barbecue avec les collègues. Cool ! 17h30, le téléphone pro resonne .

- Olivier, on part à Lorient à 19h30 !
- Ho merde, et le barbecue ?
- Bah ouais je sais bien, c'est chiant, mais c'est comme ça !

19h15, on réalise que le premier point de notre plan de vol est vraiment bizarre. Mon captain me demande d'aller dans l'avion voir ça avec la tour, pendant qu'il va voir si les médecins sont arrivés. Il me bippe quand ils sont là. Je file dans le Beech et je demande quel sera notre départ. Le contrôleur m'indique qu'i y a un problème avec le plan de vol, que notre premier point n'est pas accepté, et qu'il faudrait qu'on le change.

Au même moment, je vois que mon pro sonne, c'est le captain. Je réponds à la tour qu'on a constaté l'anomalie, qu'on est EVASAN, que les médecins sont arrivés, et que si le contrôleur pouvait nous arranger le coup, ce serait super. 5 minutes après, c'est résolu. Je remercie vivement le contrôleur, et demande la mise en route.

Ma prévol s'est fait sous la pluie et dans le vent, ça cumuléifie grave autour du Bourget. Sur la branche aller, je suis PM. Mon captain décolle l'avion, me dit "T'as bien serré ton harnais ? " et paf, nous voilà dans les gros cumulus, et ça secoue un peu. Et tout d'un coup, on ressort des nuages, et le spectacle est superbe. "Wow, regarde comme c'est beau !" que je fais à mon boss. Malheureuement, on est un peu occupé sur le départ, et je ne peux pas prendre de photo.

Un peu plus tard, on est plus tranquille, et je dégaine pour prendre cette photo (mais c'était tellement plus beau 15 mn avant…) :


En descente vers Lorient, je prends l'ATIS. Je note, et je dis à mon captain : "Ya un truc à la fi, aussi bien en anglais qu'en français, je ne comprends pas !"

- Tu veux que j'écoute ?
- Nan, attends, je réécoute un coup.

Bon, finalement, je pige le truc. Lorient est une base aéronavale, celle de Lann Bihoué, et l'ATIS indique qu'il y a des brins d'arrêt sur la piste. Ok, on intègre ça dans le briefing. Un peu plus tard, l'approche nous rappelle la présence de brins d'arrêt. Je collationne, mais le contrôleur insiste : "Ce sont des brins d'arrêt."

- J'ai pas dit ça ?
- Non, je crois que tu as dit "Points d'arrêt"
- Huhu... :-)

Bref, le chef arrive à se poser *après* les brins d'arrêt, et tout se passe bien. Le seul truc con, c'est que comme il s'est posé court, on a backtracké, et on n'a pas eu le taxiway sympa qui passe dans la forêt.

Une fois les médecins partis, on sort nos plateaux-repas, et à taaaable !


Après avoir bien mangé, on sort pour regarder le coucher de soleil :


Même une fois qu'il est couché, c'est bien joli !


Vers 1h15, les médecins sont revenus, et on repart. Je m'aligne, je roule doucement pour rouler sur le brin d'arrêt, et commencer la course de décollage après. Et c'est parti. On fonce à plus de 300 noeuds sol, et on baisse l'éclairage pour pouvoir regarder, dehors, les villes illuminées qui défilent sous nos ailes.

Mon captain demande à De Gaulle une arrivée courte. On longe le périph, et mon chef cherche la tour Eiffel, mais ne la trouve pas. Je lui dit qu'elle doit être éteinte.

- Bah non, elle est jamais éteinte !
- Mais si, regarde, le Champ de Mars est là, tu vois bien qu'elle n'est pas allumée
- C'est bizarre, ça !
- Tu crois qu'on est bien à Paris ?

Il est 2h tout rond, et nous voilà d'humeur farceuse. Je suggère : "Tu demandes au contrôleur ?"

- De Gaulle, IBJ 223 Bravo, vous nous confirmez qu'on est bien à Paris, parce qu'on ne voit pas la Tour Eiffel
- Répétez ?
- Heu... C'est une blague, en fait, on ne trouve pas la Tour Eiffel
- Ha, elle doit être éteinte, parce que je ne la vois pas non plus.

2h10, je pose le Beech sur la piste 23 du Bourget, tout en douceur (Je le souligne, parce que c'est pas tous les jours comme ça !) 3h, je me couche. Et l'après-midi, je fonce à Toussus pour faire voler mes élèves.

Et ce soir, en écrivant ce billet, je regarde à nouveau sur l'iPhone les photos du vol d'hier soir, et je m'arrête un instant pour admirer celle-ci. En vol, entre Paris et Lorient, la vue de la fenêtre de mon bureau. Le plus beau bureau du monde...

jeudi 22 juillet 2010

Une longue journée

22 heures, le téléphone sonne : "Olivier, je pense qu'il va falloir aller te coucher ! Rendez-vous au Bourget à 3h30 !" Ha oui, en effet, je ne vais peut-être pas tarder à aller au lit !

2h45. Sleep Cycle me réveille en douceur. Une petite douche pour terminer de se réveiller, un petit déjeuner rapide, et je saute dans la voiture. A cette heure, c'est cool, ça roule super bien. En 15 mn chrono, je suis au Bourget. Je me paye même le luxe d'arriver avant mon captain, qui habite pourtant... au Bourget.

Cette nuit est un peu particulière. Les contrôleurs font grève. Notre Beech a donc été prépositionné, hier soir, à Pontoise, pour éviter qu'il ne soit bloqué au Bourget. Après avoir brieffé le vol, on commence donc par une mise en place en voiture Le Bourget-Pontoise.

4h30. Nos deux médecins et la glacière embarqués, on décolle de Pontoise. Une fois en l'air, mon captain appelle De Gaulle pour activer notre plan de vol IFR et raccrocher une route.

5h50 : après avoir fait une procédure complète à la main, pour ne pas perdre la main, justement, je pose le King Air sur la piste humide de La Roche sur Yon, après avoir fait la première moitié de l'ILS dans les nuages, et le reste le nez dans l'avion. Les médecins s'en vont, on va payer la taxe à l'agent AFIS, puis on fait un dodo.

8h20 : les médecins nous appellent pour signaler qu'ils quittent l'hôpital. On se prépare.


9h05 : Décollage vers Paris, où on se pose à 9h55. A Pontoise, donc. On fait le plein de l'avion, et c'est le retour en voiture au Bourget pour faire les papiers. Le temps de faire tout ça, il est l'heure de manger. On va donc se faire un bon repas pour reprendre des forces.

14h00 : J'arrive à la maison. C'est l'heure de faire une bonne sieste.

18h00 : lever, douche, et je pars pour Toussus. Séance de tours de piste avec un de mes élèves PPL. Le déclic de l'arrondi est venu, il se débrouille vraiment bien.

Un autre instructeur du club revient de vol local. Je demande l'autorisation au contrôleur de lui dire un mot sur la fréquence.

- Tes pressé ou t'as un moment, après ton atterrissage ?
- J'a du temps !
- Ok, à tout de suite

On se pose à sa suite, et une fois le moteur coupé, je lui demande s'il peut aller faire un tour avec mon élève que je voudrais lâcher. Ils font un toucher, un complet, et une fois au parking, mon collègue sort de l'avion sans couper le moteur (sur un PA28 avec la porte qui s'ouvre vers l'avant, ça se fait de façon très safe).

Et mon élève repart, seul. Toussus est en auto-info, je ne peux donc pas monter à la tour, mais je me poste en face du seuil, avec mon Icom. Et je le regarde décoller. Une fois qu'il est en vent arrière, je lui dit à la radio : "T'en fais un seul, un !" "D'accord Olivier !"

Base, finale. Je suis un peu stressé. Je filme avec l'iPhone pour qu'il ait un souvenir. "Toussus, F-EE, en finale 25 droite pour un complet". Le coeur battant, je le regarde en courte, puis faire son arrondi, et toucher doucement. Ouf, il est posé !

Je le retrouve sur le parking, et je prends quelques photos pour immortaliser son sourire, qui monte jusqu'aux oreilles. Je suis aussi heureux que lui. C'est aussi un lâcher pour moi : mon premier lâcher d'un élève PPL. Je suis content, et très fier de mon élève.


On quitte Toussus à 23h, après avoir encore discuté un moment sur le parking de ce qu'on a tous les deux ressenti pendant ce double lâcher.

Travaux nocturnes obligent, il est presque minuit quand j'arrive à la maison. Une longue journée, sur différents aérodromes et aéroports, qui s'est merveilleusement terminée par la satisfaction de voir, pour la première fois, voler de ses propres ailes un nouveau pilote à qui j'ai appris à piloter !

mardi 20 juillet 2010

Un mardi au boulot

Je n'ai décidément pas de chance avec mes tentatives de bloguer en direct. Mon appli iPhone était en grève, je n'ai pas pu poster. Récit en différé, donc.

Décollage 8 heures du Bourget avec des médecins pour Bordeaux. Chargement d'un malade en civière, et redécollage vers Lille. Déchargement du passager, et retour au Bourget.

Du coup, hier soir, comme je ne pouvais pas être appelé, je suis allé voler à Toussus. Séance de tours de piste avec un de mes élèves PPL, et lâché d'un nouveau membre sur les PA28. Retour à la maison à 23h, couché à minuit.

5h45 : lever, douche, ptit dej. Dans 10 minutes, je pars pour le Bourget, où j'ai rendez-vous avec mon captain à 7h.

6h50 : je gare ma voiture sur le parking, désert. Personne à l'accueil du handler à cette heure. Je salue les agents du PI,F, je pose mon sac sur le tapis roulant des rayons X, je passe sous le portique et je présente ma licence.

7h00 : je suis en train de faire ma prévol. Une fois qu'elle est terminée, je m'occupe de la cabine : vérification de la propreté, du catering, mise en place des journaux et des ceintures sur les sièges, eau chaude et glaçons. Puis je rejoins mon captain aux opérations pour brieffer le vol.

8h00 : décollage, avec deux médecins à bord. Direction Bordeaux-Mérignac, où on se pose à 9h35. Les deux médecins filent chercher le patient, ce qui nous laisse un peu de temps pour préparer la prochaine branche, puis papoter tranquillement dans l'avion.

10h40 : l'ambulance arrive. Le patient peut voyager assis, donc on n'embarque pas de civière. On accroche juste sa perfusion.

10h50 : décollage. Je suis PM sur cette branche vers Lille. Une fois qu'on est installés en croisière au niveau 270, je vais discrètement indiquer au médecin notre altitude cabine en lui demandant si ça convient pour son patient. Il me répond que oui, qu'il le mettra sous oxygène si besoin. Je sers aux deux médecins et au patient leurs plateaux repas, leur demande si la température de la cabine leur convient, puis retourne m'installer dans le cockpit.

12h25 : atterrissage à Lille. Nous disons au revoir au patient, dont c'était le baptême de l'air et qui a beaucoup apprécié son vol (et son plateau repas, qui l'a bien changé de la bouffe de l'hôpital). L'ambulance part.


14h30, les médecins sont de retour, et on est repartis vers Paris, où on se pose à 15h10.

Une fois les papiers terminés, je fonce à Toussus le Noble pour aller faire un lâcher machine...

vendredi 2 juillet 2010

Participez à l'opération "Un avion pour la vie"

Aviation Sans Frontières (ASF) a lancé hier l'opération "Un avion pour la vie", à laquelle je vous invite fortement à participer. Pour financer leur troisième Cessna Caravan, l'association vend des "parts" à 50 euros.

Déjà donateur de l'association à laquelle je donne 5 euros par mois (Oui c'est pas beaucoup, mais d'une part je ne gagne pas grand chose en ce moment, et d'autre part je donne aussi à pas mal d'autres assos, mais bon, je m'éloigne du sujet, là), j'ai acheté tout à l'heure une part.


Participer à l'opération permet d'aider ASF à être plus efficace, avec ce futur troisième avion. Accessoirement, ça donne droit à un certificat de don numéroté, et de participer à un tirage au sort pour suivre une mission d'ASF en Afrique.

Alors n'hésitez pas, 50 euros, c'est la moitié d'une heure de vol, et se priver d'une demi-heure de vol pour aider les populations défavorisées d'Afrique, ça le fait, non ? Le don peut se faire en ligne, ça prend deux minutes, et ça se passe en cliquant ici.