lundi 6 mai 2013
Contre QFU
Nous partons chercher un organe dans le nord-ouest de la France. De Gaulle tourne face à l'ouest, et le Bourget aussi, donc, puisque les deux aéroports sont toujours dans la même configuration. C'est un avantage pour le départ, ça nous fera gagner du temps, mais un inconvénient pour le retour, puisqu'il faudra faire le tour de Paris par le sud, et s'éloigner loin dans l'est de la région parisienne pour intercepter l'ILS 27 du Bourget.
Décollage à 20h40 et arrivée à destination une heure après. 2h50 plus tard, nous redécollons avec, à bord, nos deux chirurgiens et un coeur qui va sauver la vie d'une personne en attente de greffe. Si tous les transports d'organes sont urgents, certains le sont plus que d'autres. Et le plus gros degré d'urgence, c'est pour le coeur.
En effet, tous les organes n'ont pas la même résistance à l'ischémie, c'est à dire à l'arrêt de la circulation sanguine dans l'organe, qui empêche l'oxygénation de ses tissus. Pendant que je referme la porte de l'avion, je comprends qu'un problème a provoqué une perte de temps de 20 minutes, ce qui n'est pas négligeable. On va essayer de regagner quelques unes de ces précieuses minutes.
Sur la branche de retour vers Paris, je suis Pilot Monitoring, c'est donc moi qui fait la radio. De Gaulle et le Bourget sont toujours face à l'ouest. Il faut tout faire pour éviter le long détour par la grande banlieue est de la région parisienne. En temps ordinaire, la solution est simple : l'approche à vue sur la piste 03. La météo ce jour là le permet. Problème : la piste est fermée pour travaux.
Dès que Brest me transfère avec Paris Contrôle, je demande s'il est possible de faire une approche à vue 27 par une verticale du Bourget, suivie d'une ouverture à droite et d'une finale. J'explique qu'on a un coeur à bord, du vent de face, et que l'organe a perdu du temps avant d'arriver à l'aéroport. Paris Contrôle me répond qu'il transmet la demande à Roissy.
Quelques minutes plus tard, le contrôleur me demande si on est intéressé par un ILS 07. Coup d'oeil à mon captain, et je réponds que oui, bien sûr, ce serait parfait. Et nous arrivons à contre QFU par rapport aux avions qui décollent à De Gaulle. En trois ans, c'est seulement la deuxième fois que j'obtiens ça. Ca nous fait gagner un temps précieux. Sur l'ILS, je laisse la COM 1 à mon captain, Le Bourget nous appelant sur la COM 2. Ce n'est donc pas moi qui quitte avec De Gaulle. Au parking au Bourget, avant de quitter la fréquence, je demande à la contrôleuse de bien vouloir remercier De Gaulle de notre part pour le contre QFU. Et le coeur file vers l'hôpital pour être greffé à son nouveau propriétaire. Mission accomplie !
La nuit suivante, nouvel organe et même problème. On arrive par le sud ouest et Le Bourget est face à l'ouest. Je demande donc si un ILS 07 est possible, à contre QFU de De Gaulle… Et une nouvelle fois, on nous l'accorde ! En deux jours, deux arrivées en sens inverse par rapport aux départs de Roissy, c'est un record !
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6 commentaires:
Ça fait longtemps que je ne suis pas venu sur ton blog. Un magnifique récit que tu me fais en guise de cadeau d'anniversaire !
Amitiés,
AleXx (Aéronet)
Enfin... le retour avec un beau récit (un peu court..) quatre mois de Neige ça suffit.
Toujours autant de plaisir à te lire en attente du prochain.
Sergio
Quoi de plus beau qu'une histoire de coeur!! :-) merci
Merci encore pour ce témoignage e transport de greffe . Avec toute l'amitié d'un greffé du foie .Lucien
S
Juste pour être certain, cela veut dire que les pistes en service étaient orientées ouest (270) et que vous avez toute fois pu faire une arrivée dans l'autre sens (070).
La question que je me pose alors est : si vous atterissez contre QFU, vous avez donc du vent dans le dos (tailwind) ? Cela ne pose pas problème ?
Thomas M
AleXx, Sergio et Looping > Merci !
Thomas > On peut se poser avec une composante vent arrière de 10 noeuds max
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