mercredi 28 avril 2010

Rapatriement sanitaire depuis Porto

4h45. L'application "Sleep cycle" achève de me réveiller en douceur. J'ai encore un peu de temps avant l'heure limite de réveil que je m'étais fixée, et je reste donc un peu au lit avant de foncer sous la douche. Le temps de prendre un bon petit déjeuner, et j'arrive au Bourget un peu avant 6 heures. Décollage prévu dans une heure avec un médecin et un infirmier et tout leur matériel pour un rapatriement sanitaire.

7h05, je viens d'effectuer la rotation du King Air qui s'élance vaillamment vers le ciel. Après décollage sur la 09, nous prenons le cap vers Nantes. Sous nos ailes, de nombreux bancs de brouillard.


Après avoir passé Nantes, nous distinguons bien Noirmoutier, "l'île aux mimosas", dont on voit ici la partie nord, la plus large, avec Noirmoutier-en-l'île à droite, l'Herbaudière au fond, et la Guérinière en bas. D'habitude, je la survole de beaucoup plus bas !


Et voici la partie sud de l'île, avec Barbâtre, La Fosse, et l'arrivé du passage du Goix, passage submersible (et donc impraticable à marée haute), qui était le seul lien entre l'île et le continent avant la construction du pont en 1971.


Nous poursuivons vers l'océan, et on passe juste à côté de l'île d'Yeu, que j'ai souvent vue d'en haut, mais jamais du niveau 270 !


A travers le disque de notre hélice droite, on distingue bien Port Joinville, à droite, et la piste de l'aérodrome, en haut, et la pointe du Châtelet à gauche.


Cap au sud-ouest, et bientôt, il n'y a plus que de l'eau sous le Beech. Nous voilà en pleine mer, nous coupons en effet en plein milieu du golfe de Gascogne. Sur la fréquence, un Easyjet demande d-tout d'un coup un déroutement vers Bordeaux pour une "urgence médicale". Brest Contrôle lui demande la nature de l'urgence : "Heart attack". Ca ne sent pas bon ! Le contrôleur lui demande d'afficher 7700 et le guide vers Bordeaux.

Après une bonne heure au-dessus de la flotte, nous abordons les côtes espagnoles, et voici le fleuve Miño (en espagnol) ou Minho (en portugais), qui prend sa source à côté de Vigo, et dont les 76 derniers kilomètres délimitent la frontière entre les deux pays.


Madrid nous transfère avec les Portugais, et nous voilà bientôt sur l'ILS 17 à Porto. Je pose en douceur (si, si !) le King Air, tandis qu'un 320 de TAP est autorisé à s'aligner en 35. J'aurais bien pris une photo du face à face avec l'Airbus, mais on peut pas piloter et photographier en même temps !



Après un peu d'attente, une ambulance arrive avec le monsieur qu'on doit rapatrier. On charge la civière à bord, sur la banquette (quatre places assises normalement) dont on a laissé les coussins au Bourget.

Redécollage de Porto, en route vers le golfe de Gascogne. On passe un moment avec Madrid, qui nous bascule sur Brest. Petit gag, parce que Brest ne me répond pas, que j'ai un doute sur la fréquence, et qu'on voulant repasser avec Madrid pour me faire confirmer la fréquence, je pousse le machin vers le bas et pas vers le haut.

Ca a pour effet d'afficher la première fréquence en mémoire, et virer celle de Madrid, que j'avais évidemment oublié de noter sur le log... :-) Et il y a sept fréquences différentes. Finalement, j'avais bien pris la bonne fréquence de Brest, mais ils devaient avoir un souci hier, ils recevaient mal (et pas que nous).

Après une nouvelle heure en mer, voici les côtes françaises, la Vendée et Saint-Gilles Croix de vie.


Nous passons de nouveau à la verticale de l'île d'Yeu. Je passe un ptit coucou sur la fréquence, mais l'AFIS est sans doute parti déjeuner ! Sur notre gauche, à nouveau, l'île de Noirmoutier.


Et nous voilà en région parisienne. Orly nous signale un Airbus, et fait aussi l'info de trafic à l'Air France. Il passe pas très haut au dessus, en route vers Roissy.


Arrivée sur Paris, établi sur l'ILS 07 du Bourget : devant, Marly le Roi, avec la forêt du même nom sur la droite. On distingue aussi le parc de l'ancien château de Marly. A l'intérieur de la boucle de la Seine, la ville du Vésinet. Et, dans le deuxième boucle, on distingue les tours de la Défense.


Une bien belle rotation (ma plus longue à ce jour), avec près de 2 500 km parcourus en 6 heures de vol à travers les espaces aériens de trois pays.

Les nuages, c'est mou, on ne peut pas bugner un cumulus !

"Ca n'existe pas les catastrophes aériennes ! Ca n'est pas possible ! Les catastrophes, elles ont toujours lieu au sol ! Il faut qu'il y ait un choc terrestre !

Les crashs, c'est par terre ! C'est des catastrophes terriennes ! Dans l'air, ça ne craint rien, il n'y a pas d'obstacles rigides ! Les nuages, c'est mou ! On ne peut pas bugner un cumulus !"

Brigitte, hôtesse de l'air (alias Florence Foresti)



Florence Foresti - Brigitte hotesse de l'air
envoyé par lessvek. - Gag, sketch et parodie humouristique en video.

lundi 26 avril 2010

Deux King Air à Nantes-Atlantique

Après Lyon, Angers, et Périgueux, encore un vol pour aller chercher un organe, cette fois à Nantes. Les deux Beech 200 de ma boîte s'y rendaient, chacun avec une équipe (on peut prendre plusieurs équipes dans la même avion, mais une fois prélevé, un organe doit être transporté le plus vite possible, donc il faut deux avions). Décollage du Bourget vers 23h45.

A Nantes, c'est la piste 03 en service, mais pour gagner du temps, je demande la 21. Le contrôleur me demande si une ambulance nous attend sur place. Je réponds oui, en précisant que nous sommes un vol organe. Du coup, nous sommes autorisés sur la 21 (qui n'est pas la préférentielle de nuit, vu que la finale survole la ville). Atterrissage à 1 heure du matin, et une fois au parking, nous retrouvons nos collègues.


Et commence la longue attente. Pendant que le captain de l'autre avion roupille comme une marmotte, nous discutons avec son copi, d'abord dans la fraîcheur du tarmac, puis en nous installant au chaud dans notre avion. Après plus d'une heure à parler, notre hôte retourne dans son King Air et nous sortons les sacs de couchage pour essayer de dormir un peu. Nous sommes réveillés par les turbines de nos collègues qui repartent les premiers avec des poumons, puis par le 757 de DHL, et enfin par un 320 de XL Airways.

Décollage à 5 heures du matin. Le plafond est à 300 pieds, et j'ai à peine décollé que la couche nous avale. Il est tôt, on a peu dormi, c'est la deuxième nuit d'organes d'affilée, donc concentration sur mon horizon artificiel pour bien garder les ailes à plat. On monte vers le niveau 190 où on s'installe en croisière. Et à nouveau défilent sous nos ailes les lumières des villes que longe notre route.

On vole vers l'est, et le ciel devient de plus en plus lumineux au fur et à mesure que le temps passe :




Atterrissage au Bourget vers 6h15 alors que le jour se lève timidement. Foie livré, mission, accomplie, il est temps d'aller dormir.


L'A86 commence à être un peu chargée, mais j'évite les embouteillages matinaux, légèrement chiant après une nuit de vol. Arrivée à la maison à 6h55 : trois heures et demi plus tôt qu'hier, c'est mieux !

dimanche 25 avril 2010

Cap au Sud Ouest pour aller chercher un foie (pas gras)

Astreinte. Je profite du soleil dans le jardin. Puis je me prépare pour le resto des pilotes du forum Aeronet. Je mets mon sac de vol et mon uniforme dans le coffre de la voiture, pour pouvoir partir directement pour le Bourget si je suis déclenché.

On passe une très bonne soirée à une quinzaine de pilotes, et on termine dans un bar (coca, ice tea et chocolat chaud pour moi, astreinte oblige...). Je rentre chez moi à 2 heures du matin, et j'arrive tout juste quand je téléphone sonne. On est déclenchés ! Décollage prévu à 3h30.

Je fais décoller le Beech de la piste 09, et on met le cap sur Périgueux. Pas de météo disponible pour le terrain, et à Bergerac, il n'y a que 600 mètres de visibilité. Pas terrible. Mais il fait beau à Bordeaux, notre terrain de dégagement. Finalement, la météo est correcte, et je pose le King Air à 5 heures du matin.

Les médecins filent vers l'hôpital, pendant qu'on essaye de dormir un peu. Dans deux heures, le soleil se lève, et il sera moins facile de dormir... C'est à 8h30 que les médecins nous appellent pour dire qu'ils seront là dans une demi-heure. Je sors de mon sac de couchage et de l'avion pour prendre quelques photos du Beech sous le soleil.



Décollage vers 9h30. En avançant vers le nord, on passe au-dessus de la couche.


Atterrissage au Bourget à 10h45 avec un foie. Et j'arrive chez moi à 11h30. Dormir ou pas dormir ? il fait grand soleil, et je n'ai pas vraiment envie de me mettre au lit... Finalement, je fais une petite sieste dans l'après-midi, pour être en forme s'il y a un nouveau vol d'organe cette nuit.

jeudi 22 avril 2010

Mon parcours en quelques dates

Beaucoup de lecteurs trouvant utile le récit de mon parcours sur ce blog, voici un résumé de mon parcours en 10 dates, pour avoir une vision rapide du timing de ma formation :

Mars 2000-octobre 2001 : formation PPL à Lognes.

Juin 2008 : licenciement économique, vente de mes actions dans ma boite, et décision de me reconvertir comme pilote pro.

Juillet 2008 : réception des classeurs de Bristol Ground School et début de l'ATPL théorique par correspondance.

Fin novembre-début décembre 2008 : stage de révision ATPL chez Hubair à Bruxelles.

Mars 2009 : Examens ATPL théorique à Bruxelles.

Avril 2009 : début du CPL/IR-ME chez Bristol Aviation, à Bristol (Royaume-Uni).

Septembre 2009 : fin de mon CPL/IR-ME, émission de ma licence anglaise.

Septembre-novembre 2009 : stage FI chez Aéropyrénées (Perpignan).

Novembre 2009 : débuts comme instructeur bénévole à Toussus-le-Noble.

Mars 2010 : MCC (sur simu 737 chez European Skybus), QT King Air (avec Aunis Air) et embauche comme copi Beech 200 au Bourget.

Mise à jour du 2 septembre 2016 :

Juillet 2013 : Passage commandant de bord sur Beech 200 dans la même compagnie.

Septembre-octobre 2015 : Embauche comme CDB TBM 900, QC TBM SET chez Airways.

Avril-Juillet 2016 : QT Bae146/RJ chez Simtech, obtention ATPL pratique.

Août 2016 : Embauche comme OPL RJ85.


mercredi 21 avril 2010

Vol organe sur Lyon dans la pagaille de la reprise des vols

22 heures, le téléphone sonne. "Salut Olivier, on part chercher un organe à Lyon !"

Haaaa ! Près d'une semaine sans voler (professionnellement parlant, j'ai fait de l'instruction entre temps), je commençais à m'encroûter ! J'enfile mon uniforme, et je file au Bourget.

Prévol effectuée, avion propre, catering vérifié. Je vais aux Ops rejoindre mon captain, qui me demande d'appeler la tour pour vérifier que notre plan de vol est bien dans les tuyaux. La tour m'indique qu'il est suspendu, mais rien d'anormal, c'est la procédure ce jour, tous les plans sont suspendus, jusqu'à ce qu'ils soient "dé-suspendus". Ca nécessite 15 mn et des appels un peu dans tous les sens, mais finalement, c'est bon, on peut partir !

23h35, les médecins arrivent. 23h45, je fais rouler le King Air vers la piste 25 tout en faisant mon briefing départ. Décollage, et rapidement, on est autorisés direct vers Moulins, puis vers Lyon. A l'arrière, les médecins se sont endormis, j'éteins donc les lumières en cabine. Nous sommes en croisière au niveau 180 (Lyon, c'est la porte à côté, inutile de trop monter), et bien vite, on commence notre descente vers la capitale des Gaules.

Cette fois, nous n'allons pas à Lyon-Bron, l'aéroport d'affaires, mais à Saint-Exupery. C'est la piste 36 en service (face au nord, donc), mais Lyon nous propose gentiment de nous poser en 18 afin de gagner une bonne dizaine de minutes. La piste et son lièvre sont visibles de loin, je finis donc à vue, et je pose à peu près correctement l'avion sur la piste qui brille de mille feux. Roulage jusqu'à parking Golf, juste à côté de la caserne des pompiers. Il est 1 heure du matin.


Les médecins partis, je discute un bon moment avec mon captain. C'est notre premier vol ensemble, puisque que mon adaptation en ligne est terminée, et que je peux désormais voler avec deux des trois commandants de bord. Puis on sort les sac de couchage et on s'installe pour dormir un peu. 2h50, le téléphone sonne : les médecins sont en route avec leur glacière. Dès qu'on voit arriver au loin les véhicules, mon captain met en route le moteur droite tandis que j'attends les médecins devant la porte (située à gauche de l'avion). Dès qu'ils sont à bord, je referme la porte, vérifie qu'elle est correctement verrouillée, et vais me glisser sur mon siège.

- Lyon, bonsoir, IBJ220B, pour la mise en route
- Bonsoir, IBJ220B. Heuuu, vous allez au Bourget ?
- Oui, au Bourget !
- Mais... Le Bourget est fermé !!

Gnééé ? Comment ça, le Bourget est fermé ?

- Vous venez du Bourget ?
- Affirm Madame, on vient du Bourget, et on y retourne
- Mais vous en êtes partis à quelle heure ?
- 21h50 Zulu
- Je vous rappelle !

C'est la meilleure celle-là... On a un coeur à bord, et il faut, de toute façon, qu'on retourne à Paris ! Heureusement, la contrôleuse nous rappelle rapidement : c'est bon. Roulage jusqu'à la 18, et on redécolle. Il est 3h20. La contrôleuse nous autorise une direct sur OMAKO, à plus de 200 NM (370 km) de là.

- IBJ220B, avec Marseille sur Centre Trente Trois Cent Soixante Quinze
- 133,175, IBJ220B

Je change la fréquence, mais ça marche po. Je redemande à Lyon la fréquence, et elle me dit la même chose. Ya un truc, là...

- Vous confirmez, 133,175
- Affirm, Centre Trente Trois Cent Soixante Quinze, Unité Trois Zéro Trois Sept Cinq
- 130,375, IBJ220B

- Marseille, IBJ220B, bonjour, EVASAN en montée vers le niveau 180 sur OMAKO
- IBJ220B, vous êtes toujours avec Lyon, Marseille sur 130,375
- Mais je SUIS sur 130,375, Madame !
- Ho, pardon ! (rire charmant). C'est moi qui me suis trompée !

Bon, finalement, on finit par joindre Marseille, qui nous confirme la directe sur OMAKO, et ne nous dit plus rien jusqu'au moment de nous transférer sur Paris. Il faut dire que c'est calme, sur la fréquence. Sous nos ailes défilent les villes illuminées, on voit bien la grosse tache lumineuse que fait Dijon sur notre droite. Et au-dessus, on voit les étoiles...

On arrive sur Paris, et nous voilà sur la fréquence de De Gaulle.

- De Gaulle, IBJ220B, on serait preneur d'un raccourci vers l'ILS si possible

Le contrôleur nous fait prendre un cap plus à gauche, pour nous faire gagner quelques minutes. Sur la fréquence, on entend un autre IBJ, nos collègues qui viennent de décoller pour aller chercher un organe à Montpellier. Petit coucou avec l'autorisation du contrôleur. Au moment où ce dernier nous envoie sur le fréquence du Bourget, je le remercie : "Merci pour le raccourci, on a un coeur à bord, et les minutes gagnées sont appréciées !" Le contrôleur répond gentiment que c'est bien normal.

On se pose, les moteurs sont arrêtés, et les médecins nous disent au revoir et se hâtent vers l'ambulance qui va les emmener, avec leur précieux chargement, vers un hôpital parisien où un receveur doit déjà attendre, au bloc, le coeur qui va lui sauver la vie.

lundi 19 avril 2010

2001-2010 : le sort s'acharne sur le transport aérien

Les cendres volcaniques en provenance d'Islande sont un nouveau coup du sort qui semble décidément d'acharner sur le secteur du transport aérien. Ce dernier a connu les plus graves coups de sa récente histoire sur une période extrêmement courte (un peu plus de huit ans).

Le 11 septembre 2001, alors que le monde est accroché aux écrans de télé qui passent en boucle les images des avions s'encastrant dans les tours du World Trade Centre, personne, à part peut-être quelques spécialistes, n'imagine encore les conséquences économiques que les attentats vont voir sur le secteur du transport aérien.

Très vite pourtant, on assiste à une conséquence très concrète et complètement inédite : la fermeture totale de l'espace aérien des Etats-Unis. Des avions qui doivent se poser sur des aéroports du grand nord canadien ou du Groenland (et on voit des parkings d'aéroports d'habitude presque déserts complètement saturés), d'autres avions obligés de faire demi-tour au milieu de l'Atlantique ou du Pacifique.


Et dans les mois qui suivent, on constate que les attentats du 11 septembre touchent le transport aérien comme jamais auparavant. Une crise qui s'étale sur plusieurs années, et qui à laquelle vient s'ajouter un autre problème : la montée du cours du pétrole.

Au moment du 11 septembre, le baril de brut est à un peu plus de 25 dollars. Trois ans après, fin 2004, il a doublé, à 50 dollars. Il atteint presque 75 dollars, soit trois fois plus, pendant l'été 2006. Après être redescendu jusqu'à 52 dollars début 2007, il remonte en flèche : 80 dollars en septembre 2007, 100 dollars en février 2008, 120 dollars en mai, 140 dollars en juin, pour atteindre un maximum de 145 dollars mi-juillet (soit près de six fois sont prix de septembre 2001).

Moi, c'est en mai 2008 que j'ai commencé à envisager sérieusement de me reconvertir, en juin que je me suis décidé et que j'ai envoyé mon virement chez Hubair, et j'ai reçu mes 13 classeurs de l'ATPL le... 15 juillet, juste au moment où le prix du baril de pétrole crevait le plafond !

Heureusement, alors que je commençais à bosser mon ATPL, le prix du baril baissait de jour en jour, repassant sous la barre des 100 dollars, puis des 50 dollars, pour atteindre seulement 35 dollars à Noël. Le problème, c'est que dans le même temps, la crise économique était arrivée.

La crise de 2008-2010 est la plus grave depuis 1929, nous dit-on. Et elle est arrivée alors que les compagnies aériennes mondiales ne s'étaient pas encore remis des conséquences du 11 septembre, et avaient perdu beaucoup, beaucoup d'argent au cours de la période (environ un an) pendant laquelle le pétrole était à plus de 80 dollars.


Et aujourd'hui, alors que la crise n'est pas encore finie, un nouveau coup du sort tombe sur les compagnies aériennes : l'éruption de l'Eyjafjallajökull, qui paralyse le transport aérien européen depuis maintenant quatre jours.

C'est une drôle de situation, qui rappelle un peu le 11 septembre, justement, ou (dans un registre un peu différent), les émeutes de 2005. Ces périodes où, en regardant la télé, on a l'impression de ne plus être dans la vraie vie, mais de vivre dans un film. Cette impression qu'on s'installe dans une situation anormale et dangereuse.

Je me rappelle, pendant les émeutes, me réveiller chaque matin en entendant à la radio qu'à nouveau, des voitures avaient brûlé pendant la nuit, et que leur nombre était plus élevé que celui de la nuit d'avant. Là, c'est un peu pareil, chaque matin, on se réveille pour entendre que l'espace aérien européen est encore fermé, et on se demande combien de temps ça va encore durer, sachant que chaque journée coûte une fortune aux compagnies, et augmente le risque de faillite des plus fragiles.

jeudi 15 avril 2010

Le pilotage sera toujours de votre âge

Du 21 au 24 mai, comme tous les ans, la Fédération Française Aéronautique et les aéroclubs partout en France organisent des journées portes ouvertes. Pour la première fois, cette opération bénéficiera d'une publicité à la télévision :


Le pilotage sera toujours de votre âge
envoyé par FFAeronautique.


N'hésitez pas à diffuser cette vidéo sur votre blog !

mercredi 14 avril 2010

AEL : ça, c'est fait !

Mon vol vers Munich était ma 18e étape, celui vers Poitiers la 19e, et le retour vers Paris était donc la 20e et dernière branche de mon AEL (Adaptation En Ligne).

Ensuite a eu lieu mon CEL (Contrôle En Ligne) au cours d'un aller-retour sur Saint-Brieuc. J'étais Pilot Monitoring à l'aller, et Pilot Flying au retour. Pas vraiment le temps de regarder le paysage aujourd'hui, vu que j'étais donc en test !

Et je n'ai même pas eu le temps de descendre de l'avion à l'escale... On n'est restés que 10 minutes en Bretagne, le temps de débarquer un passager et d'en embarquer un autre, et cette poignée de minutes a été mise à profit par le testeur pour me faire un rapide debrief de la branche aller.

Le CEL s'étant bien passé, il clôture donc la phase d'AEL, qui aura duré deux semaines, 20 étapes et un peu moins de 30 heures de vol. Désormais, je peux voler avec deux des trois captains du secteur Beech de ma boîte. Le troisième étant jeune commandant de bord, je ne pourrai voler avec lui que quand le premier de nous deux aura atteint 100 heures de vols après son AEL. Ce sera sans doute lui, vu qu'il a déjà environ 40 heures depuis la fin de son AEL Captain...

Encore une chtite étape de passée !

mardi 13 avril 2010

Cap sur la Bavière

Cette fois, on part pour Munich ! Première incursion outre-Rhin en King Air, et mon troisième pays visité depuis mon arrivée en ligne, après l'Angleterre (Oxford) et la Suisse (Genève).

Autre première, pendant ce vol : mon premier plateau-repas en vol, que j'ai dégusté (parce que c'était vraiment bon), tranquillement installé en croisière, au niveau 230 et au soleil. Ca manquait juste un peu de vin rouge pour accompagner l'excellent fromage... :-)


Après 1h45 de vol, je pose le Beech sur la piste 08 gauche de Munchen, avec dégagement rapide par la bretelle "high speed", parce que ya du monde derrière. Le plus compliqué, quand on va sur des gros aéroports comme ça, ce n'est pas en vol, c'est au sol ! Le roulage est un peu compliqué, et il faut faire gaffe de ne pas se planter. "Follow the Three Forty !" On suit donc l'A340 de Lufthansa et on trouve notre parking.


On charge le fret qu'on est venu chercher, et c'est reparti pour la France. Les contrôleurs allemands sont super efficaces pour gérer les montées (et les descentes) continues : on est quasiment toujours autorisé à monter plus haut (ou descendre plus bas) un peu avant d'atteindre le niveau auquel on était précédemment autorisé. A notre niveau de croisière, le FL240, on croise une grosse enclume blanche :


Notre route vers Poitiers nous fait traverser deux frontières, puisqu'on passe par la Suisse. Nous voilà presque à la verticale du terrain de Friedrischaffen (où je m'étais posé en 2002, et où vient de se tenir le plus gros salon européen dédiée à l'aviation générale) et du lac de Constance.


Le contrôle suisse, il nous aimait tellement qu'il a voulu nous faire atterrir chez nous. Alors que j'indique à un contrôleur qu'on est au FL240 vers je sais plus quel point, il me dit qu'on est autorisé pour une approche Bidule One Charlie... Gné ? Mais on va à Poitiers, nous, Monsieur !!!

On décline donc l'invitation, et on poursuit vers la France. En-dessous, il doit faire plutôt gros, mais là, au-dessus des nuages, il fait beau, très beau. J'ouvre la buse de ventilation pour avoir un peu d'air frais, parce que ça chauffe ! Mais bon, on ne se plaint pas, c'est tellement agréable d'être au soleil !


L'approche de Poitiers nous autorise à une approche à vue, et nous transfère sur la fréquence de Poitiers. Le contrôleur est super sympa, et dans son premier message, nous souhaite la bienvenue sur la fréquence de la tour. Mon captain pose l'avion, et le contrôleur nous demande de venir nous garer derrière un autre biturboprop, un poil plus gros que nous :


C'est l'ATR42 d'Airlinair qui repart vers Lyon.


On livre le fret, et c'est reparti pour Le Bourget, où après 5h30 de vol et plus de 1 000 nautiques parcourues, on est accueillis par une belle lumière de fin de journée.

dimanche 11 avril 2010

Vol de printemps à Granville

Vendredi et samedi, j'étais en repos. Pour me changer les idées, je suis donc allé... voler ! Tours de piste à Toussus vendredi avec un élève, avant d'aller partager un resto avec une dizaine de membres de Pilotlist pour fêter mon nouveau job.

Samedi, c'était le vol de printemps Nord de l'association Jeunes Ailes. Direction Granville, où il faisait très beau :


La piste, vue de la plage :


Le Pilatus en courte finale 07


Face à face avec le Pil' sur le taxiway :


Dans la baie du Mont Saint-Michel, un banc de sable encerclé par les flots :


L'îlot de Tombelaine, dont le nom viendrait de "tumulis belenis" ou tumulus de Belenos, dieu gaulois de la guerre, de la lumière, et guide des morts :


Le Mont, avec à son sommet l'abbaye, qui a été fondée en 966, voici plus de 1 000 ans !



Une bien belle journée au soleil avec plein de passionnés...

mardi 6 avril 2010

Nouvelle étape, nouveau titre

Il y a un an et 9 mois, ce blog voyait le jour. Dans le premier billet, j'écrivais : "Ce blog est destiné à raconter au jour le jour mon chemin vers un cockpit d'avion de ligne." J'avais choisi comme titre : "Objectif : cockpit".

Il y a quelques jours, j'ai soudain été frappé par une évidence. L'objectif était atteint.

Il était donc logique de changer le titre, puisque désormais, le but de ce blog sera de raconter ma vie de pilote pro et mon évolution vers, sans doute, plus tard, d'autres machines.

Mon "parrain" dans la profession, précisément celui que j'évoquais dans le deuxième post de ce blog, m'a soufflé l'idée du nouveau titre et de son jeu de mot (que m'avait déjà fait un autre pote pilote, soit dit en passant).

La photo a changé aussi, elle est plus adaptée à mon nouveau quotidien que celle de la piste de Toussus sous la neige, qui avait fait son apparition quand j'ai commencé l'instruction là bas.

J'espère que ce nouveau titre vous fera sourire, que la photo vous plaira, et si vous avez un blog avec un lien vers celui-ci, pensez à l'actualiser avec le nouveau titre !

lundi 5 avril 2010

Ptite balade à G'nèèève

Planning impeccable. Lever vers 10 heures tranquillou, apéro (non alcoolisé pour moi of course) et déjeuner. Vers 14h, le téléphone sonne, c'est mon captain : "Olivier, on va aller voler ! Rendez-vous au Bourget à 15h30." Très bien, ça me laisse juste le temps de profiter du dessert et des oeufs en chocolat.

Décollage à 16h30. Je suis Pilot Monitoring, et je demande une directe vers Genève, si possible. On a rapidement une directe vers LUSAR, début de la procédure, c'est parfait. Du niveau 190, on commence à distinguer les Alpes enneigées.


L'approche sur Genève est superbe, avec les Alpes, le lac Léman et le jet d'eau de G'nèèève, et sur notre gauche, un monomoteur en finale sur la piste en herbe. Follow me, parking, et confort des canapés en cuir du Crew Lounge, où on profite de quelques oeufs en délicieux chocolat suisse. Puis notre organe arrive, et c'est reparti.

Mon captain fait la radio, et demande le roulage. La tour nous demande d'attendre le passage d'un Citation que l'on voit au loin rouler vers nous, derrière un Follow Me. Mon commandant précise qu'on est un vol EVASAN avec organe à bord. Dans les 10 secondes, le contrôleur nous autorise à rouler, et fait ralentir la voiture jaune et le jet blanc qui la suit. Royal ! Je décolle face au lac, et une fois le pilote automatique enclenché, je dégaine l'iPhone pour une ptite photo du lac qui s'éloigne derrière nous.


On trace direct vers OMAKO, et sur notre gauche, le soleil descend inexorablement, me permettant de faire quelques belles photos.



Remarquez, sur la gauche, le disque dessiné par notre hélice :


Descente vers OMAKO, et on s'approche de la couche :


On va passer dedans !



Je me fais l'ILS 27 à la main, et pose délicatement les roues du King Air quelques poignées de secondes après la nuit aéro. Encore un bien beau vol, mes 9e et 10e branches.

dimanche 4 avril 2010

Une nuit en mission organes

21h00. J'envoie un SMS à mon captain d'AEL : "Ca arrive, un vol organe en plein milieu d'un WE de Pâques ?" Il me répond que c'est pas le plus probable, mais qui sait...

22h30. Je suis dans mon lit, au téléphone avec un ami, Dan, First Officer chez Baboo, et je lui raconte mes premiers vols et mon bonheur à être dans le ciel. Bip bip, un signal d'appel. "Dan, je dois te laisser, c'est mon captain !"

"Olivier, on part voler !" Je saute du lit, j'enfile mon uniforme, et je saute dans la voiture, direction Le Bourget. Je fais la prévol, le devis de masse et centrage, je remplis d'eau chaude la thermos, je mets quelques quotidiens à bord, je passe un ptit coup d'aspirateur dans l'avion, puis je regarde avec mon CDB le plan de vol, la météo, les NOTAMs, et on attend les médecins.

Décollage du Bourget à minuit et demi, on entre rapidement dans la couche. Direction Marseille pour une mission organes. On a très vite une directe sur le VOR d'Avignon. On sort de la couche, et bientôt se devinent au sol les villes illuminées. Nevers, Vichy, Saint-Etienne, Montélimar défilent sous nos ailes comme autant de phares dans la sombre immensité de la nuit.

On débute la descente, et on entre dans la couche. Et ça commence à secouer sévère. Mon captain tient le volant, au cas où l'auto-pilote capitulerait sous les coups de boutoirs des turbulences. On est autorisé à descendre, mais j'ai du mal à attraper la petite manivelle de l'altitude set, et mon commandant a aussi des difficultés à vérifier un truc sur la Jeppesen, tellement on est secoués.

C'est la 13 en service à Marseille, ça tombe bien, ça va nous faire gagner du temps, et on ne sera pas fâchés d'être posés. Marseille nous demande notre vitesse (230 kt), et nous demande de les maintenir le plus longtemps possible, pour nous faire passer devant un 737. On est un vol EVASAN, donc prioritaire.

Je pilote le Beech à la main sur l'ILS, et je finis à vue. Atterrissage sur la piste 13L qui est trempée. Rapide 180° et court backtrack pour dégager rapidement alors que le gros phare d'atterrissage du Boeing arrive en finale. Atterrissage vers 2h30. Une ambulance, escortée par les gendarmes, vient chercher les médecins, et nous on essaye de dormir un peu dans l'avion, allongé l'un sur la banquette, l'autre sur les dossiers de la banquettes posés par terre dans la soute.


Heure indéterminée (pas eu le courage de regarder ma montre). Je suis réveillé par la pluie qui tambourine sur le King Air. On se prend une sacrée saucée... Je finis par me rendormir.

7h. On est réveillés en sursaut pas un nouveau tambourinement, mais cette fois, c'est un gendarme qui tape à la porte. Les médecins sont là. Ha oui, mais ce n'est pas les nôtres, c'est ceux de l'autre avion. Bon, tant pis, maintenant qu'on est réveillés, on va se préparer. Je vais chercher la météo, et le temps qu'on l'étudie et que je fasse le devis de Weight & Balance, nos médecins arrivent avec leurs glacières.

Mise en route, et décollage sur la 31R (c'est bien Marseille, on atterrit face au sud-est et on décolle face au nord-ouest, pratique quand on vient de paris et quand on y retourne !) Sur la branche retour, je suis PM (Pilot Monitoring). Je m'occupe donc de la radio.


Mon captain me dit : "Ta mission, si tu l'acceptes, est de négocier une directe sur OMAKO (OMAKO, c'est pas loin de la Ferté Gaucher, donc depuis Marseille, c'est une sacrée directe !) Je tente donc le coup, avec le mot magique :

- Marseille, IBJ 204 Bravo bonjour, EVASAN en montée vers le niveau XX, directe YY, on serait preneur d'une directe OMAKO si possible.
- IBJ 204 Bravo, directe Omako
- Directe Omako, IBJ 204 Bravo, merci Monsieur.

Le truc délire, c'est qu'à la place de "Monsieur", j'aurais pu dire "Patrick". Car je ne l'ai su qu'il y a 10 minutes, mais le contrôleur de Marseille était un autre pote ! Un peu plus tard, il accède à ma demande de monter vers le niveau 280.


Un niveau qui nous permet de sortir enfin de la couche et de surfer sur une mer de coton, tout en profitant du ciel bleu et de la douce chaleur du soleil. Et là encore, je réalise le bonheur de pouvoir profiter d'une heure de soleil alors qu'à Marseille et à Paris, il fait gris et il pleut.


Quelques minutes plus tard, j'entends un Baboo sur la fréquence. Comme je suis un peu endormi, je suis incapable de dire si la voix me dit quelque chose ou pas (l'oreille et le cerveau étant ultra-efficace pour filtrer les messages qui ne commencent pas par le bon call sign, cocktail-party effect oblige). Je tends donc l'oreille, et oui, pas de doute, je reconnais très bien cette voix. C'est celle de Dan, avec qui je parlais au téléphone il y a une dizaine d'heures, et qui dit "Bon matin" au contrôleur (qui n'est plus mon pote, on a changé de fréquence entretemps).

Cinq minutes passent, puis :

- IBJ 204B, avec Paris sur XXX,XXX
- XXX,XXX IBJ 204B, merci Monsieur, bonne journée !
- (Voix de Dan) Heu... Olivier ?
- (Moi) Salut Dan !

Et voilà, encore un ! Ca fait deux amis sur les ondes dès mon troisième jour de boulot !

Bon, c'est pas tout ça, on a quand même 22 000 pieds à perdre avant OMAKO, nous ! A la demande de mon captain, j'ai calculé depuis un moment notre top of descent. On va prendre un peu de marge, ce sera donc 80 NM avant. On commence donc la descente, et on quitte le soleil pour plonger dans la masse cotonneuse.

Le contrôleur nous signale un A330, à deux heures, à quelques nautiques. Je lance un regard interrogateur à mon captain. Bah oui, c'est gentil de nous le signaler, mais bon... "Dis lui qu'on est en India Mike". Je transmets au contrôleur... On est guidés radar pour intercepter l'ILS 27 du Bourget. Les nuages se déchirent pour nous laisser entrevoir le doublet sud de Roissy, tout proche à notre droite.


Finalement, on sort de la couche et la piste est en vue. Atterrissage, roulage, parking Hôtel 0. Il est 9h15 locales. On a quittés le Bourget il y a presque neuf heures.

Les médecins s'engouffrent dans une ambulance avec leur précieux chargement, qui va partir vers un hôpital parisien pour sauver la vie de patients qui étaient en attente de greffes. Nous avons passé la nuit dehors pour faire les livreurs de morceaux de vie, modeste mais indispensable maillon de la grande chaîne des dons d'organes.

10 heures, je suis de retour à la maison. Je vais me coucher pour tenter un cycle de sommeil. L'appli iPhone Sleep Cycle me réveille juste quand il faut, quand je suis repassé en sommeil léger, et c'est (presque) en pleine forme que je me lève juste à temps pour l'apéro, le dîner dominical en famille, et une après-midi calme avant de repartir en vol pour de nouvelles aventures.

Putain, j'aime ce métier !

(Histoire parallèle : http://120enligne.free.fr/?p=201)