vendredi 31 décembre 2010

Bilan et rétrospective 2010

L'année qui se termine est l'occasion d'en faire un bilan, comme je l'avais fait l'an dernier (voir bilan 2009 et rétrospective 2008-2009).

475 heures de vol en 2010 (344 sur Beech 90 et 200, 128 en instruction, et 3 heures sur avion léger hors instruction), contre 175 heures en 2009, et seulement 22 heures en cumulé entre 2005 et 2006... J'ai doublé mes heures de vol en 13 mois, puisque j'en avais 500 à la fin de mon stage FI, en novembre 2009, et que j'ai passé les 1000 ce mois-ci.

Au bilan de l'année aussi, la MCC, la QT Beech 90/200 (qui est ma première, mais loin d'être la dernière), mon premier boulot comme pilote pro, et le début d'une expérience en biturboprop, en TPP et en travail en équipage.

Petite rétrospective de mon année 2010 :

Janvier :

Ce mois, qui sera mon dernier à faire de l'instruction à plein temps ou presque, est marqué par les grosses chutes de neige. Après pas mal de vol de nuit les premiers jours, la neige entraîne la fermeture de Toussus pendant près d'une semaine. C'est aussi en janvier qu'a lieu Aéroski 2010, avec les Jeunes Ailes.


Février :

Début février, je reçois de la DGAC la lettre de validation de mon CPL britannique. Je passe les caps des 600 heures totales et de ma 100e heure d'instruction. Mais février, c'est surtout le mois du début de ma MCC, que j'ai faite en Angleterre, à Bournemouth, chez European Skybus.

Mars :

En mars, suite et de la MCC, avec les premiers vols au simu, un exercice de dépressurisation, etc. Puis c'est la QT Beech 90/200. C'est aussi ma première véritable urgence en vol, avec un dégagement de fumée en cabine pendant un vol d'instruction en Rallye. Et c'est le mois de la première embauche comme pilote pro, et de ma première mission en tant que pilote salarié.

Avril :

Mois de l'AEL (Adaptation En Ligne). Au début du mois, j'ai le plaisir de croiser en fréquence, sur le même vol, un ami dans un Embraer, et un autre dans son centre de contrôle. Avril a aussi été marqué par l'éruption du volcan islandais, avec quelques difficultés de redémarrage des aéroports. Au programme de ce mois également, un vol vers l'Allemagne, et ma première mission vers le Portugal.

Mai :

En mai, premier vol vers l'Espagne pour ma première mission de transport de fret. Et ma formation sauvetage et secourisme au BEPN d'Air France.

Juin :



Juillet :

Un jour de grève du contrôle, nous décollons de Pontoise et y ramenons l'avion après la mission. Ce même jour, je lâche mon premier élève PPL. Juillet se termine en mettant le cap sur la Pologne, vers Katowice. Ma destination la plus lointaine à ce jour (8h30 de vol aller-retour, plus de 2 000 NM, 7 pays survolés et 11 passages de frontière).

Août :

Je termine le mois par ma plus longue mission à ce jour, avec cinq étapes : Le Bourget Cannes Brest Kerry (Irlande) Le Havre Le Bourget. Presque 10 heures de vol, et découverte de la verte Irlande.

Septembre :

Le mauvais temps revient, avec un roulage dans le brouillard à Saint-Brieuc. Je retrouve le soleil en allant deux fois en Corse en trois jours, Bastia d'abord, puis Ajaccio et Bastia. Je fais mon premier POGO entre Villacoublay et Le Bourget. Fin septembre, ce sont les Virades de l'Espoir, pendant lesquelles je ramène des poumons pour donner une nouvelle vie à un patient atteint de la mucoviscidose.

Octobre :

Je vais à Hyères où je croise les Rafale du Charles de Gaulle, alors en cale sèche. Et je découvre pour la première fois Amsterdam et ses six pistes.

Novembre :

Un organe en matinée (un week-end) me permet de voir quelques amis lyonnais. Je bats mon record de passagers transportés (9 pax, soit 11 dans l'avion). Et on survole la France enneigée.


Décembre :

Je vole pendant la journée des grosses chutes de neige en région parisienne, et découvre le Bourget tout en blanc. Et je passe le cap symbolique des 1 000 heures de vol. Pas de réveillon de Noël en famille pour moi, je passe la nuit du 24 à voler, ramenant 5 organes, beaux cadeaux de Noël pour les patients en attente de greffe !

samedi 25 décembre 2010

Joyeux Noël !


Bonnes fêtes de fin d'année à toutes les lectrices et à tous les lecteurs de ce blog !

Merci de votre fidélité, et n'hésitez pas à poster de temps en temps un commentaire, ou à envoyer un petit mail, ça fait toujours plaisir d'avoir des retours des gens qui apprécient la lecture de de blog.

En cadeau, une petite vidéo du ré-entraînement du père Noël (c'était peu avant qu'il passe avec succès ses tests de prorogation avec un inspecteur de Transports Canada) :


Une nuit du 24 décembre en vol à jouer au papa Noël en livrant les plus beaux cadeaux du monde

Jeudi 23 décembre. Un ami, tout récent CPL-IR qui a l'occasion de faire quelques vols en safety pilot sur Beech 90, écrit sur Facebook : X is flying the King Air to Paris at night on Christmas Day, that's gonna be my best Christmas ever !!"

Ce à quoi je réponds en commentaire : "Bah moi j'aimerais bien réveillonner tranquille et ne PAS piloter le King Air la nuit de Noël (ni celle du nouvel an svp papa Nowel, merci !)"

Vendredi 24 décembre. L'après-midi a commencé, et je prévois de la laisser glisser tout en douceur jusqu'au début des agapes du soir. Sauf que...

15h40, mon téléphone pro sonne. Avant même de décrocher, je sais que mon réveillon de Noël va passer à l'as. "Salut Olivier, on part dans une heure chercher un organe à Poitiers". C'est confirmé, pas de réveillon en famille cette année ! Le délai est plus court que d'habitude. En général, on nous appelle environ 1h30 avant l'heure du décollage, avec un objectif d'être au terrain une heure avant. Là, si je me dépêche, j'aurais 40 minutes. Sauf que...

Ca bouchonne sur la route. Je mets au moins deux fois plus de temps que d'habitude, et je gare la voiture au Bourget 25 minutes avant l'heure de décollage prévue. Va falloir se dépêcher un peu. Mais sans courir, parce que le parking avions est une vraie patinoire.

L'avion est déjà dehors. Le vent est glacial, et bien que la visite prévol ne soit pas très longue, je finis le tour du King Air complètement congelé. Je sors les fiches Jeppesen du départ "L'Aigle 1J", du terrain d'arrivée et du premier terrain de déroutement pour les mettre dans le classeur "réduit" que nous allons utiliser pour le briefing aux Opérations.

Je vérifie que la cabine est propre, que les ceintures sont bien placées, qu'il y a des lingettes rafraîchissantes à portée de chaque siège. Je mets en place la presse du jour, fais le plein d'eau chaude, un complément de boissons fraiches, le plein de madeleines, petits gâteaux et bonbons (en y ajoutant quelques papillotes spéciales Fêtes), et vais chercher dans le frigo les quatre plateaux-repas destinés aux deux médecins et aux pilotes, manquant de me casser le figure en dérapant sur le verglas. Partie "Susana" de la prévol terminée !

Les médecins ne seront pas à l'heure, et ça tombe bien, ça nous laisse plus de temps pour préparer !

Je rejoins mon captain aux Ops, le "réduit" sous le bras. Pendant que j'étais à l'avion, il a bossé sur les papiers : plan de vol, log de nav, météo, notams, devis de poids et centrage, catégorisations d'aérodromes, manifeste passagers, enveloppe de vol... On étudie ensemble tout ça, ainsi que les Jeppesen. Et nous sommes prêts. Il ne manque plus que nos passagers et leur grosse glacière.

On s'installe dans le salon d'accueil des passagers pour les attendre. Dès qu'on voit arriver la grosse voiture avec le large gyrophare barré du mot "GREFFES", le captain file à l'avion pour demander la mise en route pendant que j'accueille le chirurgien et son interne. Je les fais passer le PIF (Poste Inspection Filtrage) et les accompagne jusqu'à l'avion, l'interne poussant la glacière posée sur un chariot à roulettes, et le gros sac contenant tout le matériel d'intervention étant posé sur le dessus.

On embarque et j'arrime la glacière dans la soute arrière, vérifie que la porte est bien fermée (sur le King Air, elle s'ouvre vers l'extérieur, donc si les crochets de verrouillage ne sont pas bien en place, avec la différence de pression en attitude, je vous laisse imaginer le résultat). Je referme les portes coulissantes qui séparent l'arrière de l'avion de la cabine passagers, pour limiter le niveau sonore et conserver la chaleur dans la cabine, puis je vais m'installer sur le siège droit, le fameux 00A.

On commence la procédure de démarrage du moteur numéro 1. Puis on indique au pistard qu'il peut déconnecter le groupe de parc (qui se branche sous l'aile droite sur le King Air). Une fois que c'est fait, il nous fait signe qu'on peut démarrer le 2. Une fois que c'est fait, le captain, qui est PF sur cette branche, me demande l'Aster start up check-list. On la déroule ensemble, puis je demande le roulage vers le point d'arrêt 09.

Le captain fait rouler l'avion, avec précaution tant qu'on est sur le parking, puisqu'il n'a pas été déneigé et qu'il est maintenant bien verglacé. Les taxiways, par contre, sont parfaitement dégagés. Au Bourget, on traverse systématiquement une piste au roulage, que ce soit pour décoller de la 09 ou de la 25, ou après avoir atterri sur la 07 ou la 27. Seule exception, quand on atterrit sur la 03 (qui est pleine de neige en ce moment, et donc fermée).

Parfois, le contrôleur sol nous autorise, dés le début du roulage, à traverser la 03-21 (si on part en 09) ou la 27 (si on part en 25), d'autres fois, il nous demande de maintenir au point d'arrêt.

Pendant le roulage, on fait les actions roulage, puis la taxi check et le briefing départ (qu'on prend soin d'interrompre si la traversée de poste 03-21 ou 27 a lieu avant qu'il ne soit terminé). En approchant le point d'arrêt, before line up procédure, puis check associée. Et une fois autorisé à l'alignement, before take off procédure et check lits. Et c'est parti.

Après le décollage, on poursuit sur l'axe de la piste 09 (086°) jusqu'à l'interception de la radiale 097 de BT, le VOR du Bourget, qu'on suit jusqu'à 13 NM de BT, puis virage droite. Dès que le contrôleur du Bourget nous a identifié radar, il nous passe avec De Gaulle.

Quand on est EVASAN, on a très rapidement une directe vers la destination. Aujourd'hui, le contrôleur de Paris Info n'a pas dû encore passer en mode papa Noël, parce qu'il nous laisse aller vers le VOR de l'Aigle, ce qui n'est pas très direct, puisqu'après LGL, le GPS nous montre un virage gauche quasiment à 90° pour aller sur Poitiers... Finalement, plusieurs caps donnés par le contrôle nous permettrons de raccourcir un petit poil et transformer le virage à 90° au frein à main à la verticale de LGL en courbe plus douce.

A Poitiers, le vent est légèrement arrière, mais bien en deçà de notre limitation à 10 noeuds, j'indique donc au contrôleur qu'on se posera en 21 pour gagner quelques minutes. Un des trucs importants qu'on apprend au CPL, c'est qu'il faut être le plus opérationnel possible, on n'est plus un pilote privé en balade (et je me rappelle l'avoir rappelé à un colibri en cours de mûrissement qui a fait quelques vols avec moi et qui voulait faire une verticale d'un terrain contrôlé :-) ). Ca devient particulièrement important en vol de transport d'organe, où chaque minute compte !

L'ambulance est déjà là et mon captain gare le Beech à quelques mètres. Une fois les médecins partis et notre départ préparé, nous regardons nos montres. Il est 19 heures, le soir de Noël. Première option : trouver un resto accessible à pieds. Après avoir pris les conseils de l'agent de sûreté qui nous accueilli gentiment dans son bureau et utilisé diverses applications sur l'iPhone, on part en expédition. Mais le vent est tellement glacial qu'on renonce très vite. Retour dans les locaux de la sûreté après un passage dans l'aérogare, déserte.


Option numéro 2 : se faire livrer une pizza pour avoir un truc chaud en plus de nos plateaux-repas froids. Oui, mais c'est le soir de Noël, et personne ne répond. On se contente donc de nos plateaux. Ils sont heureusement un peu améliorés aujourd'hui, avec du saumon fumé, de la mousse de je ne sais pas quoi, des crevettes et une très acceptable petite buche au chocolat. Tout ça arrosé d'un coca, pas d'alcool pour nous bien entendu.

21h25 locale, je commence le roulage vers la piste 03. Ce n'est pas un, mais deux organes que nous ramenons à Paris. Comme ça arrive quelquefois, le "Personne ne le prend, ce rein ? Bon, on l'embarque, ce serait dommage de gâcher !" a joué, et cet organe imprévu va pouvoir profiter à un patient en attente de greffe. Après être arrivé dans la capitale, il redescendra dans le sud par la ligne, sans doute transporté par un Air France.

On a rapidement une directe vers BALOD, et à 22h20 locale, je pose le Beech sur la piste 07. Je n'utilise pas les reverse, puisque, enneigement oblige, on doit dégager tout en bout de bande, et que les 3 kilomètres de la 07 sont bien longs pour le King Air... Le roulage est plus long aussi, forcément, et c'est à 22h30 que j'arrête les turbines.

Bon, en me dépêchant, ya moyen de m'accrocher en cours de repas. L'avion est rapidement entré dans le hangar, et c'est au chaud que je remets en place les protections et que je met un peu d'ordre dans la cabine avant de rejoindre le captain aux opérations. Je suis quasiment sur la pas de la porte et je pense déjà au goût du foie gras. Sauf que...

"Olivier, on repart !" Et merde... Je calcule rapidement de tête, et confirme à mon captain que ça va faire short pour l'amplitude et que nos opérations feraient mieux de déclencher l'autre équipage d'astreinte aujourd'hui. Bon, le réveillon va peut-être pouvoir être sauvé. Oui mais non, parce que l'autre équipage doit partir une heure après chercher un autre organe dans le sud.

Je pose donc mon sac et file dans le hangar pour faire la prévol et débâcher l'avion tant qu'il est dans la chaleur relative du hangar, plutôt que dans le vent glacial comme tout à l'heure.

Décollage prévu à 23 heures. On quitte le bloc à 00h20 (Oui, on passe beaucoup de temps à attendre les passagers, dans ce boulot...). Cette fois, c'est moi qui suis PF sur la branche aller vers Rennes. Décollage en 09, interception da la radiale 097 de BT, mais très vite le contrôleur de De Gaulle nous donne un cap 160. Puis interroge :

- IBJ224X, si vous poursuivez le virage vers le 270, vous pouvez éviter Paris ?
- Affirm, IBJ224X
- IBJ224X, poursuivez le virage vers le cap 270 et montez vers le niveau 70

Pendant que le captain collationne, je serre le virage et dès qu'il a fini de répondre au contrôleur, je lui demande si on va bien passer au nord du périph (que je ne vois pas de la place droite en étant en virage du même côté). Il me confirme que c'est bon. Après un virage à 180 degrés par rapport à notre axe de décollage, nous voici donc entre Paris et les arrivées du doublet sud de Roissy. Ca, c'est opérationnel !

On a rapidement une directe vers Rennes, et après 45 minutes en l'air, je pose le King Air sur la piste 28. Une fois les moteurs arrêtés, je passe à l'arrière et demande à la chirurgienne pour combien de temps elle pense en avoir. Et j'ai la désagréable surprise d'apprendre que l'organe n'est pas prélevé à Rennes, mais dans une petite ville de la campagne bretonne, à une bonne heure de route de l'aéroport, soit deux heures de plus au total par rapport au délai normal de prélèvement d'un foie (qui est déjà l'organe le plus long, puisqu'il est prélevé en dernier).

J'allume l'iPhone et consulte le site du NORAD. On a dû croiser le père Noël et son traîneau, puisqu'avant notre départ, il était en vol entre la Norvège et Amsterdam, et qu'à notre arrivée, il était entre les Canaries et les Açores, après être passé par Paris et Andorre. On ne l'a pas vu en tous cas !

Puis commence une longue attente dans l'avion. Nous essayons de dormir, mais malgré mon sac de couchage et le plaid par dessus, je suis plusieurs fois réveillé par le froid. Il fait -2° dehors, et l'avion n'est pas chauffé… C'est la partie la plus galère des missions organe l'hiver, et quand on se pèle grave en essayant de dormir, on a beau se dire qu'on aide à sauver des vies, le temps paraît bien long !

On passe ainsi plus de 6 heures à attendre dans le froid. Puis les médecins arrivent avec les glacières. On embarque alors que le moteur droit tourne déjà. Quand on démarre avec groupe de parc, on met en route le numéro 1 (à gauche) en premier, puisque le groupe se branche à droite. Par contre, quand on démarre en autonome, c'est d'abord le 2 (à droite), puisque la batterie est située dans l'aile droite, et donc plus proche du numéro 2.

C'est à 7h30 qu'on repart vers la capitale. Le contrôle de Brest nous donne une directe vers BALOD, puis Paris nous envoie sur SUBOX, ce qui nous raccourcit encore un peu. C'est moi qui fait la radio au retour, et en quittant chaque fréquence, au lieu de dire "au revoir" comme d'habitude, je dis "Joyeux Noël !" (et comme hier soir, ils sont nombreux sur la fréquence). Pendant la croisière, je branche mon iPhone sur le Clarity, et je me mets quelques chants de Noël. Le soleil se lève derrière la turbine droite du Beech, et sur une journée de Noël qui sera le début d'une nouvelle vie pour 5 personnes en attente de greffe...


Il fait beau sur Paris, et on a une belle vue sur les arrivées sur De Gaulle, à notre gauche, et sur La Défense, Paris, la tour Eiffel, Montparnasse, le dôme des Invalides, etc, sur notre droite. Atterrissage en 07, et à nouveau long roulage vers le parking, sur lequel les pompiers sont de passage pour leur inspection matinale.


Les médecins débarquent avec leurs glacières, les pistards entrent l'avion, je le bâche, nouveau petit ménage, un peu de paperasse, et je reprends enfin le chemin de la maison, où j'arrive à 9h15.

Je me couche pour ajouter quelques petites heures de sommeil aux 3 ou 4 que j'ai réussi à grappiller dans l'avion. Et, cette fois, dans un lit douillet et au chaud ! Et je me réveille juste à temps pour prendre une douche et me préparer pour le déjeuner du jour de Noël, qu'il n'était pas question de rater !

Moi qui espérais ne pas passer ma nuit du 24 décembre en vol, c'est plutôt raté. Mais pour cette toute première nuit de Noël passée en vol, j'ai la satisfaction d'avoir joué au père Noël pour des gens qui en avaient un besoin vital.

Grâce aux chirurgiens, aux coordinateurs, au contrôleurs et pompiers d'astreinte, aux conducteurs, et à mon captain et à moi-même, ce sont pas moins de 5 (grands) enfants qui ont trouvé dans leurs chaussons un organe tout neuf en ce jour de Noël. Certainement leur plus beau cadeau de Noël, puisque ce cadeau, c'est la vie !

jeudi 16 décembre 2010

1 000

7 heures du matin. Il a neigé sur le Bourget ! Une couche fine mais bien blanche, comme en témoigne la photo ci-dessous.


8 heures, nos passagers arrivent. On les embarque, et c'est parti. Sur cette mission, mon captain fera l'aller, et moi le retour. Après un décollage face à l'est, on met le cap vers le nord et vers OPALE. Et bientôt, la côte du même nom arrive devant nous :


9h45 (8h45 locale), nous atterrissons sur la piste 01 de London-Oxford airport. Après nous être reposés le reste de la matinée dans le très confortable Crew Rest, on part en ville (c'est à dire à Woodstock, la petite ville à côté) pour déjeuner. Après avoir bien mangé, on va faire un tour dans un magasin, et on tombe sur cette bière :


Il n'en reste que deux, mon captain prend l'une, et moi l'autre. Retour à l'aéroport et au Crew Rest, et quelques petites parties de Flight Control en réseau bluetooh plus tard, nos passagers arrivent et c'est reparti.

16h05. Heure locale, soit 17h05 heure française. En montée vers le niveau 190, à l'ouest de Londres, à proximité de Farnborough. Il y a 20 minutes que j'ai fait décoller le King Air de la piste 19 de l'aéroport de Londres-Oxford. Nous sommes au soleil, au-dessus de la couche. Un coup d'oeil à la montre, et je me dis : "Ca y est !" Et, évidemment, je repense à un autre vol…

C'était en décembre aussi, il y a neuf ans. Au cours d'un rascol dans l'ouest américain (à l'époque où ça ne s'appelait pas encore Far West). J'étais en place gauche d'un Cessna 172. Avec moi, deux amis de Pilotlist. Nous avions décollé de Minden-Tahoe pour aller à Mammoth Yosemite airtport, un terrain à plus de 7 000 pieds, avec un tour de piste à 8 000 ft. C'était mon premier vol en commandant de bord en Cessna, et mon premier vol en CDB aux Etats-Unis. Et au cours de ce vol, j'avais passé la barre des 100 heures de vol, passant à trois chiffres.

C'est à la main que je pilote le Beech 200, puisque j'avais convenu avec mon captain, lors du briefing, que je ne pouvais pas être au pilote auto pour passer ce moment. Une autre barre symbolique, celle des 1 000 heures de vol total. Passant ainsi à quatre chiffres (en attendant d'atteindre, dans un bon paquet d'années, celle des cinq digits !)

Je prends quelques photos pour immortaliser le moment :



En rentrant à la maison, je remplis mon carnet de vol, qui affiche désormais un total de 1000h40. Et je reviens sur les vols de mes précédentes centaines.

La 200e avait été passée en 2003, en route vers l'île d'Yeu.

La 300e, c'était pour aller à un rassemblement de Pilotlist, celui du mariage de deux membres de la liste à Barcelonnette.

La 400e en mai 2009 entre Bristol et Gloucester, en IFR, sur Seneca.

La 500e pendant mon test FI, en novembre 2009.

La 600e en février 2010, instruction Vol de nuit à Toussus.

Les 700e, 800e et 900e cette année, sur King Air, respectivement entre Le Bourget et Saint-Brieuc, en route vers Barcelone, et entre Farnborough et Montpellier.

Il m'avait fallu un peu moins de 10 ans pour atteindre les 500 heures. Et seulement 13 mois pour les 500 suivantes.

Les caps comme ça, c'est bien, ça permet à la fois de jeter un coup d'oeil dans le rétroviseur (et dans le carnet de vol, se rappelant ainsi de bons souvenirs de vols) et de penser à l'avenir et aux nombreux vols à venir…

jeudi 9 décembre 2010

Le Bourget sous la neige

Tranquillement au chaud à la maison, je regarde la neige tomber et les centimètres de poudreuse s'accumuler dans le jardin, en me félicitant de ne pas avoir à sortir sur les routes...

13h58, le téléphone sonne. On doit partir à Clermont-Ferrand pour y amener un équipage d'une compagnie régionale qui ramènera un avion et des passagers de la capitale auvergnate. Le temps de me changer, et je me mets en route sans tarder, ne sachant pas combien de temps je vais mettre pour rallier le Bourget.

La nationale glisse un peu, je roule donc au pas. Puis ça commence à bouchonner... Pas d'embouteillages sur l'A86 et l'A3, mais ça roule au pas vu les conditions météo. Mais au moins, ça roule. C'est dans la bretelle entre l'A3 et l'A1 que ça se gâte. On est complètement arrêtés, et ça dure, et ça dure.


Une grosse demi-heure plus tard (pour faire moins d'un kilomètre), j'arrive sur l'A1, où ça roule à peu près. Avant de bouchonner à nouveau dans la sortie vers le Bourget. A nouveau une demi-heure pour faire quelques centaines de mètres...


Du coup, j'ai le temps de prendre des photos, les arbres sont tout blancs, c'est très joli !


Après 1h30 dans la voiture (contre 15 à 20 minutes en temps normal), me voilà au Bourget. Les parkings sont tout blancs, et les avions aussi...


On prépare l'avion et le vol, et puis c'est l'attente de nos passagers, qui sont eux aussi coincés dans les embouteillages. Le King Air les attend sagement...


Les deux pilotes et les deux PNC arrivent enfin, et nous voilà partis. Roulage prudent sur les taxiways enneigés, surtout dans les virages qu'on prend sur la pointe des pneus. Au Bourget, quand on est face à l'est, les décollages se font sur a piste 09 et les atterrissages sur la piste 07. Mais au moment de notre départ, la piste 09 est pleine de neige, et les décollages se font donc sur la 07. Mon captain est PF. Un peu avant 80 noeuds, ça commence à glisser un peu. Encore 15 kt à prendre, et c'est la rotation : on est mieux en l'air qu'à rouler à près de 180 km/h sur la piste légèrement glissante !

Vol sans histoire jusqu'à Clermont-Ferrand, ça ne givre quasiment pas ! Pendant la descente, on profite d'un joli panorama, avec les nuages sombres se détachant sur le ciel plus clair, sous la luminosité de la lune...


Alors qu'on dégage la piste, le contrôleur nous prévient qu'on a un créneau 7 minutes plus tard. On n'arrête que le moteur de gauche (côté porte), mon captain accompagne les passagers pendant que je reste à mon poste, et c'est reparti dans la foulée. Temps passé au bloc : moins de 5 minutes.

Au décollage, ça secoue sévère. Je laisse mon captain faire office d'auto-manettes, préférant tenir le volant à deux mains ! Puis ça se calme, revoilà la Bourget. La piste a été bien dégagée, et ça ne glisse plus du tout. Par contre, notre parking est encore tout enneigé.


On a une deuxième mission en fin de soirée, mais là aussi, il faut attendre les passagers, qui nous appellent pour nous prévenir qu'ils quittent Orly. On n'est donc pas prêts de les voir arriver ! Une fois de plus, le Beech 200 attend sagement de repartir dans le ciel nocturne...


Pendant ce temps, un Falcon 50 attend de pouvoir décoller. A l'intérieur, la chanteuse Shakira qui doit se demander si elle va pouvoir arriver à temps pour son concert à Francfort. Son captain réussit à avoir un créneau pour Cologne (à 200 kilomètres de là !). (Finalement, son concert sera annulé et 11 000 fans l'auront attendu pour rien...)

Finalement, nos passagers arrivent, et des fonctionaires du FMI, qui attendaient désespérément un taxi pour rejoindre leur hôtel, se précipitent. On roule avec précaution sur le parking encore plein de neige, puis plus normalement vers la piste 25, les taxiways étaient maintenant parfaitement bien déneigés.

A Vannes, c'est grand beau temps, et je pose le King Air à vue tandis que mon captain fait la radio en auto-info. Le pompier nous attend devant l'aérogare. Comme tout à l'heure à Clermont, on n'arrête qu'un moteur, et on repart immédiatement. J'appelle Brest par téléphone pour clôturer le plan de vol et demander la mise en route pour le retour. Et c'est reparti.

On passe entre Rennes et Nantes, puis on longe la ville du Mans toute éclairée. Avec un bon vent dans le dos, on file à plus de 300 noeuds, et voici déjà la région parisienne. On survole la N118 qui n'est qu'un long ruban de feux rouges, ceux des voitures en galère, alors qu'il est 1 heure du matin. Je dis à mon captain qu'on devrait faire l'info trafic. Je ne crois pas si bien dire...

De Gaulle nous fait un guidage radar aux petits oignons pour nous raccourcir. Et puis le contrôleur nous demande :

- IBJ208D, vous voyez le périphérique sud ?
- Oui, on le voit
- Ca roule comment, s'il vous plait ?
- Pas trop mal, mais par endroits c'est bien chargé.
- Ok, merci !


Après quatre étapes et 5 heures de vol, je quitte le Bourget, et rentre chez moi en 20 minutes sur une 1A3 et une A86 parfaitement dégagées (mais avec des files de camions garés sur la voir d'arrêt d'urgence), en faisant quand même attention une fois en ville, où ça glisse un peu...