vendredi 9 août 2013
Nuit étoilée
Hier, avec mon copi, nous avons vu le soleil se lever et se coucher depuis le cockpit de notre King Air. D'abord un retour de Blois au petit matin. Décollage à 6h10, et en arrivant sur Paris, on surfe au-dessus de la couche en admirant ça :
Arrivée au bloc au Bourget à 6h45 locale. Après nos 12 heures de récupération réglementaire, un vol vers Bâle dans la soirée. Nous n'avons pas vu le soleil disparaitre derrière l'horizon, puisqu'il était dans notre dos, mais il nous a largement fait profiter de son coucher en parant les nuages devant nous de couleurs à couper le souffle :
Puis nous avons plongé dans la couche et le mauvais temps et Arnaud a amené l'avion vers la piste d'une main de maître après une VOR-DME dans les nuages et sous une pluie battante.
Quelques heures plus tard, non sans avoir fait un mini-rascol, nous avons décollé de Bâle, au milieu de la nuit, avec deux organes à bord et toujours dans un temps pourri. Après une montée dans la couche, on a émergé dans un ciel clair constellé d'étoiles.
Celles et ceux d'entre vous qui ont lu "Artisan pilote", le premier livre de Jan Tutaj, se rappellent forcément d'un des récits du bouquin, un de mes préférés, qui s'appelle "Une nuit dont je suis fier".
Jan raconte le convoyage d'un ATR entre Limoges et Dinard par une nuit de pleine lune où la visibilité est excellente et où les villes illuminées dessinent sous les ailes de l'avion une carte de France en noir et or. Jan écrit :
"On va faire un exercice sympa. Je baisse toutes les lumières du poste, je dime tous les potards, j'éteins les quatre EFIS et je dis à mon copi : "Maintenant, tu nous emmènes à Dinard"."
Evidemment, le copi dit qu'il ne peut pas, sans écrans, sans cap, sans VOR. Et Jan lui montre qu'il voit Poitiers, Rennes, et aussi Saint-Malo, et donc Dinard, depuis longtemps, et qu'il suffit de regarder dehors. Puis Jan fait asseoir à sa place le steward, et... mais c'est une autre histoire
La nuit dernière, une fois qu'on a été établi en croisière, j'ai tout dimé dans le cockpit, et on a regardé dehors. Loin devant, on voyait déjà l'immense lueur de la région parisienne. On s'est penché en avant, appuyés sur la casquette. Et on a admiré les étoiles, Arnaud commentant la visite : la Grande Ourse évidemment, la couronne boréale, la Voie Lactée, etc.
Puis est apparue la première étoile filante. Puis une deuxième. Et une troisième. Souvent, les vols de retour d'organe, en pleine nuit, paraissent bien longs. On a été sortis du sommeil 30 minutes avant le retour des chirurgiens au terrain et on n'a qu'une hâte, c'est de retrouver nos lits. Mais je n'ai pas vu passer celui de cette nuit.
C'était un moment magique, et j'ai évidemment pensé à Jan et à son vol de nuit vers Dinard. Cela fait presque dix ans que j'ai lu ce texte pour la première fois (c'était en 2004, quelques mois avant la publication), mais je me rappelle très bien que cette lecture avait provoqué chez moi deux sentiments contradictoires : le plaisir de lire ce récit en m'imaginant dans l'ATR, et le regret de penser que je ne vivrai jamais la magie d'un tel vol de nuit.
Je me trompais.
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
4 commentaires:
Quel plaisir de voir que tu as retrouvé le temps de prendre la plume (les touches, plutôt) pour nous faire partager ces magnifiques paysages.
Bons vols...
Superbe récit Olivier, ça fait rêver !
Il n'est jamais trop tard pour changer de voie...
Trés joli récit.
Cette lecture provoque chez moi deux sentiments contradictoires : le plaisir de lire ce récit en m'imaginant dans le beech, et le regret de penser que je ne vivrai peut-être jamais la magie d'un tel vol de nuit.
On en reparle dans 10 ans ? :-)
Thomas M
heureux de te relire ! félicitation pour le 4ème galon ! à plus !
Enregistrer un commentaire