dimanche 13 novembre 2011

Cap sur Oujda, capitale du Maroc Oriental

Ca faisait un moment que je n'avais pas mis les pieds sur le continent africain. Presque un an. Ma dernière mission m'y a emmené, puisque nous sommes allés au Maroc. Départ matinal avec l'avion plein à ras bord de carburant : 3600 livres (soit 2 160 litres).

Nous sommes en EVASAN, et nous obtenons assez vite une directe sur l'Espagne. Il fait grand beau quand nous abordons les Pyrénées. Nous avons briefé qu'en cas de dépressurisation, on arrêterait la descente au niveau 140, mais le grand beau temps nous permettrait, en cas de besoin, de descendre plus bas puisque nous serions en VMC.


Suit le survol de l'Espagne, dans sa partie la plus monotone et triste, presque désertique tellement elle est pelée (donc pas de photo). Nous ne voyons pas beaucoup la Méditerranée car nous volons (au niveau 270) au-dessus d'une couche soudée de nuages. Celle-ci se disloque avant la côte, et nous voyons arriver le continent africain, synonyme pour moi de tellement de récits d'aventure que la vision de cette côté africaine me fait toujours rêver.

Séville nous fait passer avec la fréquence de Casablanca. La contrôleuse marocaine s'étonne : "Mais, vous êtes dans l'espace aérien algérien !" Bah on est où on nous a dit d'aller, Madame ! Elle nous renvoie sur la fréquence d'Alger. Je commente à mon captain : "Ca y est, ça commence à être le bordel !"

A gauche, justement, c'est l'Algérie, puisque notre destination, Oujda, est juste à côté de la frontière. Au milieu de la photo, le cap des trois fourches s'avance dans la mer sur une vingtaine de kilomètres. A gauche du cap, l'enclave espagnole de Melilla.


Les instructions du contrôleur ne sont pas très précises, donc on en profite pour faire une directe sur le terrain pour gagner du temps, en évitant quand même la ligne droite depuis notre position pour ne pas entrer sur le territoire algérien. En longue finale 13, nous passons au-dessus des monts des Béni-Snassen (du nom des tribus qui y habitent).


Et nous voilà en finale piste 13, face aux monts d'Oujda.


L'aéroport d'Oujda est bien équipé, avec deux longues pistes de 3000 mètres (et des taxiways aussi larges et longs), et une aérogare flambant neuve. Sur la photo ci-dessous, l'ancienne aérogare :


Et voici la nouvelle, à l'architecture moderne et occidentale.


Dès l'arrivée, un douanier se présente au pied de l'avion. On remplit un premier formulaire. Puis arrive un deuxième officiel, qui nous fait remplir un formulaire. Puis un troisième, qui... nous donne un formulaire à remplir. Ils aiment bien les formulaires, en Afrique.

Nos médecins partent à l'hôpital chercher le patient, et nous partons en quête de l'essencier. Un des douaniers nous dirige vers l'ancienne aérogare, mais elle a l'air bien calme. Nous nous arrêtons chez les pompiers pour leur demander où aller. Ils sont 5 ou 6 en train de manger, et nous invitent à nous joindre à eux. Nous nous asseyons avec eux autour du grand plat dans lequel tout le monde mange du mouton et des pommes de terre (les Marocains viennent de fêter l'Aïd el Kébir, ou fête du mouton). Un moment convivial très sympa et vraiment traditionnel !

Puis on va faire le plein de l'avion, payer les taxes, et dès le retour de nos passagers, c'est reparti. La route du retour nous fait passer par l'Algérie. Nous mettons le cap sur le VOR d'Oran, et nous sommes ensuite censés aller jusqu'à celui de Mostaganem. Notre statut d'EVASAN nous permet de couper un peu en allant directement sur le point BAHRI, puis le point HAMRA (tous deux prononcés par le contrôleur algérien avec un accent qui les rend quasiment incompréhensibles).


Je vérifie régulièrement la distance et le temps de vol jusqu'à l'aéroport espagnol le plus proche. Notre petit patient (un bébé) n'est pas en grande forme, et s'il fallait se dérouter pour raison médicale, il serait mieux de pouvoir l'envoyer dans un hôpital espagnol (plutôt qu'algérien). La lumière décline doucement tandis que nous traversons à nouveau la Méditerranée.


Il fait nuit quand nous arrivons sur l'Espagne. Le spectacle de la côte et de grande tâche de lumière de Barcelone est superbe. On passe au-dessus des Pyrénées sans les voir, et voici Toulouse. Si on doit se dérouter maintenant pour raison médicale, ce sera encore plus simple qu'en Espagne.

Sur le GPS, avec ce niveau de zoom, c'est un peu un bazar de waypoints :


Le vol se poursuit au-dessus de la France, grande zone noire parsemée de tâche lumineuses. Devant nous, c'est Limoges, et à gauche, on voit bien l'agglomération bordelaise.


La contrôleuse de Paris coordonne avec Roissy pour nous raccourcir le plus possible la trajectoire. Nous avons une directe vers Toussus. Elle nous demande de garder la vitesse, et nous dépassons même les 250 noeuds (sous le niveau 100 !), à la limite de la VMO.


On déboule sur l'ILS à fond la caisse, on réduit au dernier moment, et je pose l'avion sur la piste 07 du Bourget, après un peu plus de trois heures de vol. Une bonne journée, avec près de 7 heures dans l'avion !

11 commentaires:

Erwan a dit…

Sans rentrer dans les détails (parce que je ne comprendrais surement pas!) mais y a t'il des procédures particulières lorsque l'on a un blesser à bord?

Merci pour le récit et les photos!
A+

florent a dit…

C'est toujours un grand plaisir de lire ton blog, merci pour ce billet.

Unknown a dit…

Un beau récit, et le plaisir de relire ton blog après 2 mois d'absence Olivier. :-) Merci et bons vols à toi.

Ugo.

LJ35 a dit…

Erwan > Il peut arriver que les médecins demandent une altitude cabine zéro (pour les patients avec des problèmes respiratoires), ce qui limite notre Beech au niveau 120 environ. Sinon, rien de particulier, sinon qu'on emporte beaucoup de matis médical (oxygène, aspirateur à mucosités, valise médicale, score...)

On peut aussi être amené à envisager un déroutement pour cause médicale, si l'état du patient s'aggravait, dans ce cas le terrain de déroutement serait choisi après concertation avec le médecin.

Florent > Merci !

Erwan a dit…

Merci beaucoup pour les précisions!
;-)

Mika33 a dit…

Voilà une journée bien remplie.
Cela devait être sympa comme tout ce vol, j'aurais aimé être dans le pit.

Albé a dit…

Un bien beau vol mais surtout quel bel avion :-)

Rayan14 a dit…

Beau récit (et aussi superbes photos)!!

clopino a dit…

Avec quelques jours de retards je découvre ce récit avec autant de passion que les précédents!!! Merci beaucoup.

Les Planningeurs a dit…

Merci pour ce récit et surtout merci de me donner l'occasion de vous relire.C toujours un plaisir.
Laurent

Le dernier dodo (AND) a dit…

Un bien beau, récit pour de bien belles photos.
merci pour ce billet